Ma copine est enceinte
Voilà une position peu confortable. Tout tourne autour d’elle, et toi, c’est ta tête qui tourne ! Il faut entendre ce qu’il faut entendre… tu dois avoir envie de te cacher ou de crier, bon ça, c’est pareil pour elle, si ça peut te faire te sentir moins seul…
La loi fixe un cadre qui ne t’est pas très sympathique. C’est elle qui décide si elle poursuit cette grossesse ou non. Alors, n’en déduis pas que tu n’as rien à dire. Ce qui compte, ici, c’est comment le dire. Parlez-vous ! Dans un premier temps, réfléchis à ce que tu souhaiterais, toi, au fond. Et puis pourquoi pas faire une liste avec les questions que tu te poses, les peurs qui sont en toi ?
Ton rôle paraît secondaire et pourtant, il est primordial. Pour autant qu’elle tienne à toi, elle n’attend qu’une chose, la boule au ventre : ta réaction. Peur que tu te barres, peur que tu te moques, peur que tu la forces dans un sens ou un autre…
Recherche sur le vécu des hommes dans le processus qui les amène à devenir père : "la naissance d'un père"
Photo de Ayo Ogounseide
« Elle l’a fait exprès »
Cela peut arriver, mais comment le prouver ? Si c’est vrai, elle n’a pas été correcte. Mais tu savais que vous n’étiez pas protégé ? Et puis, en es-tu sûr ? Si tu as un doute, parles-en avec elle.
Mais attention, si ce n’est pas le cas, cette accusation va la blesser. Ce cas de figure reste plutôt rare et non vérifiable. En plus, ça ne change rien à son état de grossesse, ni au fait qu'un enfant se fait à deux. Tu as le droit de demander les preuves qu’elle est enceinte.
« Et si je n’étais pas le père ? »
Bonne question. Si tu la poses, elle risque de se vexer. Pourtant, je suis partisane du test ADN que tu peux demander. Il coûte et est souvent mis à charge du père… Bon, on peut aussi s’accorder pour un partage des coûts.
Mieux vaut un test très tôt, qui lève le doute, qu’une grosse crise à l’adolescence de ton fils ou de ta fille, que tu renies, que ça blesse, que ça provoque des dégâts, que ça enrage. Mais avant de régler cette question, il faut voir si elle poursuit la grossesse ou non.
« Je vais partir à l’étranger »
Mauvaise solution! Le système suisse, par son code civil, protège les intérêts de l’enfant. Bien que la reconnaissance en paternité ne soit plus obligatoire depuis 2013, si un juge ordonne l'établissement de ta paternité, tu pourrais être contraint de payer une pension et si tu ne le fais pas, tu t’endetterais ici. Plus question de revenir sans être saisi. Ce n’est pas la solution de facilité qu’on pourrait imaginer. Et puis, ce n'est pas vraiment favoriser un bon développement du petit.
Si tu as un père engagé, tu en es sûrement reconnaissant. Sinon, tu aurais préféré qu'il soit là, non?
On peut élever un enfant à deux sans être en couple.
Photo de Nathan MacBride
« Je veux qu’elle avorte et elle ne veut pas »
Tu ne peux pas la forcer, pas plus que tes parents. Je demande de l’humanité : qu’on s’écoute avec attention ! Demande un médiateur, allez ensemble au planning familial, prenez rendez-vous avec notre équipe de professionnelles, bref, parlez-vous, parlez-en, mais renonce aux pressions.
« Je veux qu’on le garde et elle ne veut pas »
Même réponse que si c’est le contraire, c’est elle qui tranche. Je conseille de parler, parler, parler, sans pression et sans agressivité. Chaque jeune femme enceinte étant différente, je ne peux pas écrire ici comment elle se sent. Peut-être qu’elle a peur, et la rassurer peut aussi lui donner une chance de voir le futur autrement. Peut-être que c’est hors de question pour elle. Et alors là, surtout, exprime ce que tu ressens, calmement. Oui, la loi lui donne le pouvoir de trancher, parce que la loi dit que la femme qui doit pouvoir disposer de son corps. Qu’on soit d’accord ou pas avec ça, on doit faire avec.
Apaiser la relation
Si des tensions apparaissent à travers cette décision ou encore après, pendant la grossesse ou après l'IVG, il vaut la peine de soigner la relation. Prendre du temps ensemble, faire une activité à deux, se rappeler aussi qu'on n'est pas qu'un couple mais aussi des amis...
Je recommande aussi une consultation dans un centre de santé sexuelle et pourquoi pas rencontrer un couple qui a pris l’une ou l’autre décision et peut parler de son vécu ?
Une séance avec un médiateur ou un thérapeute de couple, juste pour faciliter la communication face à cet enjeu de taille, peut être un complément utile.
Quelle que soit l'issue de la grossesse, vous traversez peut-être une crise majeure. Si c'est le cas, la prendre au sérieux et se faire aider maintenant a un rôle préventif sur vos relations futures, de couple et/ou parentales.
Prenez soin de vous, passez du temps à deux, rêvez!
Photo de Andrew Avdeev